Philosophie - Identité Mot tabou s'il en est, Louis Ledonne

 

 

Mot tabou s'il en est. Le qualificatif "identitaire" est ainsi devenu l'arme de disqualification la plus répandue dans le milieu médiatico-politique. Est classable parmi les identitaires quiconque défendrait l'idée d'une communauté nationale dont la nature dépasserait la simple adjonction d'individus sans aucun lien entre eux sinon d'être doté d'une carte d'identité ou passeport du pays dans lequel ils vivent.

 

Mais dans une société où l'individualisme consumériste incite chacun à porter en bandoulière sa supposée identité, son moi triomphant, chacun est alors sommé de la construire en dehors de tout déterminisme historique ou naturel, en dehors de tout donné. En revanche, qu'une minorité, forcément opprimée, revendique une identité semble un droit dont on se gardera de se demander s'il enferme ceux que l'on englobe dans cette supposée identité. Finalement la seule identité véritable serait l'identité nationale dont le seul but serait, semble-t-il, d'exclure les derniers arrivés.

 

L'articulation entre les différentes strates identitaires qui composent chaque individu et le rattachement à des collectivités sans l'y enfermer est le fondement même de toute vie collective. Tenter de définir et de redéfinir ces différentes identités, à la fois historiques, géographiques et culturelles est un exercice nécessaire pour comprendre les liens qui se nouent entre les hommes et qui font qu'aucune communauté humaine ne peut être réduite à un simple agrégat d'individus.

 

Tout le problème des constructions identitaires contemporaines est qu'elles relèvent d'une projection narcissique.  Dans ce cadre, une identité collective, nous inscrivant dans une mémoire, ne trouve que difficilement sa place et pourtant elle est nécessaire car c'est elle qui perpétue nos valeurs qui émanent de nos mythes, de notre histoire et elle peut servir, à ce titre, de socle commun.   

 

L'idéologie libérale, en ce qu'elle ne veut concevoir que des individus, considère comme une oppression toute forme d'identité collective qui ne serait pas choisie par eux.  Ce faisant, elle rend impossible le sentiment d'appartenance qui soude une société et réunit les citoyens autour d'un projet commun. Ce n'est pas en instaurant un tabou autour de l'idée même d'identité que l'on combat l'intolérance, mais en faisant de l'identité le sujet d'une recomposition permanente, entre la mémoire commune, l'héritage passé, et la façon dont les citoyens veulent les perpétuer.

 

Et  ceci n'est pas contradictoire avec le fait d'avoir des appartenances multiples ; on peut se sentir à la fois wallon, belge, italien, européen, bref homme du monde. Ce que nous devons être par ailleurs.

 

Mais le point de passage obligé est d'avoir des racines qui nous constituent et de les faire soi en profondeur.Et c'est de ce cette façon que le dialogue et la vie avec d'autres communautés sera la plus aisée.    

 

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