Philosophie - Une expérience, peut-être un cadeau, Louis Ledonne

 

Oser qualifier ainsi son expérience de réclusion : un cadeau, une joie, ceux de faire le vide et de cheminer dans un voyage intérieur aux confins duquel l’on peut être un peu mieux outillé pour accomplir le vœu auquel Gandhi exhortait son auditoire : être soi-même le changement que l’on veut voir dans le monde.

 

C’est vrai que le moment que nous vivons est tragique, mais la vie est tragique. Mais pour évoquer le confinement, ne faudrait-il pas le voir aussi comme une surprise de la vie, comme une expérience inédite, où le temps de beaucoup d’humains est figé, où le temps social devient digital, où le temps des sollicitations habituelles si nombreuses et parfois difficiles à départager s’évanouit.

 

Se préoccuper des choses ancillaires et en même temps être dans l’essentiel ; ce précieux vide qui permet de perdre ses repères, qui sont autant de balises que d’enfermements. Bien sûr, je vis cette réclusion dans des conditions matérielles privilégiées, sans souci du lendemain.

 

Mon isolement me place face à cette injustice majeure : être confiné et pouvoir contempler, toucher de la verdure, entendre des proches n’est en rien comparable avec la situation de ceux qui éprouvent cette période dans la solitude, la précarité, l’insalubrité, et parfois une promiscuité dangereuse.

 

Pour la première fois dans l’humanité, la réponse à cette crise vient de ceux que l’on dénomme les compétences invisibles, celles dont on ne découvre l’importance vitale que l’lorsqu’elles sont absentes ou manquantes. Certes, les outils numériques sont majeurs mais manger à sa faim, disposer d’eau et de chauffage, de rues propres, de devoirs pour les enfants, sans compter sur les professionnels de la santé, nous le devons à tous ces métiers souvent mal rémunérés, insuffisamment considérés et qui apportent la réponse à notre survie.

Le confinement nous offre l’opportunité de nous asseoir, et de laisser enfin la vie décider pour nous. Cela n’enlève pas la peur, la souffrance, le mal-être parfois. Mais cela nous permet de nous départir de nos jugements, préjugés, automatismes et de comprendre que nous ne sommes pas nécessairement ce que nous faisons, ni ce que nous représentons mais ce que nous donnons.

 

L’alternative à laquelle l’humanité est exposée est limpide. Soit elle repart de plus belle dans sa frénésie de conquête, de hâte, d’accumulation, de consommation, elle accepte d’être exposée à des coups de semonce de plus en plus fréquents et violents, jusqu’à celui qui mettra fin à son irresponsabilité. Soit elle admet qu’il faut reconsidérer en profondeur l’organisation du monde et celle de ce que nous sommes. Toute communauté de vie exige, pour fonctionner en harmonie, une gouvernance, par définition fondée sur l’équilibre des contre-pouvoirs. Depuis la crise de 2007, le constat est davantage celui du dépérissement que du renforcement des rares contre-pouvoirs.

 

Moraliser le capitalisme, réguler le libéralisme, apurer le sens et la vocation de la finance aux fins d’une économie de marché soucieuse de juguler les injustices, de sanctuariser l’environnement et le climat et d’éveiller un citoyen responsable relèvent-ils d’une chimère ?

 

Le capitalisme financier, c’est-à-dire la manière dont le diktat financier a dévoyé le capitalisme en le désindexant de sa vocation, être au service de l’économie, doit être combattu. Pour y parvenir, les leçons de la crise du coronavirus suffiront-elles, même si elles peuvent accélérer et « mondialiser » les prises de conscience de manière synchronisée ?

 

La Nature étouffe, suffoque, elle nous dit de rendre à la hauteur de ce qu’elle nous donne, de mettre notre intelligence en harmonie avec la sienne, de saisir tout ce qu’elle peut nous apprendre (n’est-elle pas le plus extraordinaire gisement de connaissance), et de reconsidérer la manière dont nous la traitons, ou dont nous la maltraitons.

 

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Commentaires: 2
  • #1

    louis (mercredi, 18 novembre 2020 09:43)

    test

  • #2

    louis (jeudi, 19 novembre 2020 15:43)

    test2